Une épave de la Belle Epoque arrachée à la vase

Par Claude Glunz    (can be translated to English with Systran or Altavista)

La «Bourse de l'aventure» de L'Illustré est placée cette fois sous le signe de l'eau. En partenariat, pour la première fois, avec l'émission de la TSR (Television Suisse Romande) «Passe-moi les jumelles», elle vous présente, l'aventure à pour théâtre le fond du Léman et comme objectif le nettoyage de l' «Hirondelle», une épave vieille de 130 ans.

Penché sur l’eau, a l’avant de la barge, Alain a les yeux fixés sur les bulles d’air crevant la surface à quelques mètres de la plate-forme. Régulièrement, cependant, son regard se porte sur sa montre. «Top 15 minutes! s’écrie-t-il soudain en se retournant en direction de son camarade aux commandes du compresseur de chantier. C’est bon, tu peux couper l’air.»

A 45 mètres sous la surface du Léman, à quelques encablures des berges de La Tour-de-Peilz, deux plongeurs se regardent surpris. Décidément, le temps passe vite, pensent-ils. Dégager l’épave de 1’Hirondelle de sa gangue de boue, au moyen d’une suceuse, a quelque chose de fascinant. Le désir de voir apparaitre quelques nouveaux détails de ce fleuron de la flotte du Léman au siecle dernier fait presque toujours regretter la brièveté d’une plongée à ces profondeurs.

«Couper l’arrivée d’air de la suceuse, explique Alain Vuagniaux en souriant, est le signal le plus efficace de re-montée.»

Apres quinze minutes passées à 45 mètres, les plongeurs doivent déja effectuer, sous la barge, à 3 mètres de profondeur, un palier presque équivalent à la durée du travail au fond. Par mesure de sécurité, nous effectuons ces paliers en respirant de l’oxygene, ce qui aide à désaturer l’organisme de l’azote qu’il a emmagasiné durant la plongée.

«C’est la profondeur de l’épave qui rend son dégagement délicat. Pensez que sa poupe est à pres de 60 mètres sous la surface. Et, plus on descend, plus la durée des paliers s’allonge pour un temps de travail identique.»

Cette épave, sur laquelle s'acharnent les lauréats de la Bourse de l'aventure, gît à cet endroit depuis plus de cent trente ans. Construite en 1855, l'Hirondelle fut le premier bateau du Léman entièrement construit en Suisse, par l'entreprise Escher Wyss de Zurich. Commandée pour faire face au trafic attendu en raison du développement du chemin de fer dans la région, sa capacité était de 800 places. Sa présence sur le lac fut de courte durée. Après s'être échouée une première fois en février 1857, le 10 juin 1862, en voulant éviter une barque de pêche, l'Hirondelle talonne sur un rocher devant La Becque-de-Peilz. Des travaux sont aussitôt entrepris pour essayer de la sortir de sa fâeheuse position mais, le 18 juillet de la même année, une violente tempête la fait définitivement sombrer.

Il faudra attendre 1968 pour que quatre plongeurs tombent par hasard sur son épave. Celle-ci deviendra rapidement un but de plongée très prisé, réservé cependant aux adeptes confirmés de ce sport «sous-lacustre» en plein développement dans la région.

Il y a cinq ou six ans, Alain Vuagniaux, 47 ans, plongeur cameramen spécialiste de la plongée spéléo, se met à rêver de pouvoir contempler un jour, dans sa totalité, l'Hirondelle dont seul le tiers avant sort de la boue.

Après quelques études, il finit par mettre au point un système de suceuse qui rend l'opération réalisable.

«Pour moi, comme pour la majorité des plongeurs, une épave représente toujours un mystère. Qu'elle soit située près de chez nous et non pas aux Caraïbes la rend encore plus attrayante. Bien sûr, nous ne nous attendons pas à de grandes découvertes, mais il reste néanmoins un mystère à éclaircir: la coque est-elle complète ou, comme certains le pensent, sa partie arrière, cassée durant la tempête, gît-elle beaucoup plus bas, au pied de la falaise?»

«Le dégagement de l'Hirondelle est une entreprise de longue haleine qui va s'étendre sur plusieurs années, et le montant du prix de la Bourse de l'aventure ne suffira pas à couvrir les frais. Nous espérons donc pouvoir créer une fondation afin de mener notre projet à son terme.»

Des travaux par 50 mètres de fond

Sous la barge, entre 40 et 60 mètres de profondeur, les plongerurs dégagent, à la suceuse, l'épave de l'«Hirondelle». La boue rejetée à proximité de la surface crée un large nuage gris.

L'«Hirondelle», accouplée ici au Simplon devant le pont du Mont-Blanc à Genève, ne sillonera guère longtemps les flots du Léman.

Lancée en 1856, elle coule le 18 juillet 1862 au large de La Tour-de-Peilz.

Dans le Léman, les conditions de visibilité sont rarement bonnes. A cette profondeur, la nuit règne habituellement.

L'article est originallement publié en 1996 dans L'Illustré, Suisse, email illustre@ringier.ch
Publié dans Nordic Underwater Archaeology avec permission de L'Illustré et de Bertrand Dumas
Photos: Claude Glunz, Bertrand Dumas. Layout: Per Åkesson, juin -97.


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